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Véhicule électrique : un avenir en question ?

Alors que 2023 lançait une dynamique très positive pour la vente de véhicules électriques, avec près d'un véhicule sur cinq immatriculés en France étant entièrement électrique et une hausse de 37 % des ventes en Europe, le début de l'année 2024 marque un ralentissement notable. En janvier, la France a enregistré une chute de 44 % des immatriculations de véhicules électriques, et en mars, les ventes ont diminué de 11,3 % en Europe. Cette baisse peut être attribuée en partie au coût élevé des véhicules et à la réduction des subventions dans certains pays européens, notamment en Allemagne, qui est un marché clé pour le véhicule électrique. Le prix reste l'un des principaux obstacles à l'adoption généralisée, mais la compétition avec les véhicules hybrides intensifie également la pression. De plus, le manque d'infrastructures de recharge continue de poser un défi majeur, contribuant fortement à la baisse du marché.

Face à ces défis, quel est l'avenir du véhicule électrique ? Est-il menacé ?

 

Pour répondre à ces questions, nous examinerons d'abord les politiques actuelles avant de discuter des stratégies potentielles à envisager dans le futur. Nous analyserons les mesures en place en Europe, en Chine et aux États-Unis. Ensuite, nous explorerons la position des différents acteurs du secteur automobile et les perspectives qu'ils envisagent, en mettant un accent particulier sur le développement de la batterie solide.

 

QUEL EST L’AVENIR DU VEHICULE ELECTRIQUE ?

 

LES POTENTIELLES POLITIQUES FUTURES EUROPE

 

En France, les résultats des élections européennes ont confirmé la montée de l'extrême droite, avec le Rassemblement National (RN) en tête, récoltant 31,37% des voix. Au Parlement européen, les groupes de droite et d’extrême droite dominent, notamment avec le Parti populaire européen (PPE) qui détient le plus grand nombre de sièges, soit 189 sur 720 (26,25%). Le groupe d'extrême droite, Identité et Démocratie (ID), remporte également 8,06% des sièges.

 

Ces groupes politiques expriment ouvertement leur scepticisme vis-à-vis du véhicule électrique. Par exemple, en France, le RN critique le coût élevé de ces véhicules pour les classes moyennes et la désindustrialisation du secteur automobile au profit de l'Asie. Ils semblent déterminés à remettre en question les politiques favorables au véhicule électrique, y compris la loi interdisant la vente de véhicules à essence et diesel, adoptée par le Parlement Européen le 14 février 2023, qui a été immédiatement contestée par plusieurs membres, y compris des eurodéputés italiens de la coalition de droite et d’extrême droite, ainsi que par la Pologne et la Bulgarie.

 

Le 10 mars 2023, l'Allemagne a pris la tête de l'opposition au Conseil de l'Union Européenne, demandant des ajustements spécifiques, notamment la possibilité d'utiliser des carburants synthétiques pour les véhicules thermiques après 2035. Bien que la Commission Européenne ait accepté d'envisager cette demande, elle n'a rien acté définitivement, dans l'attente de négociations sur les conditions d'utilisation de ces carburants. Récemment, l'Europe a renforcé sa position, posant de nouvelles conditions pour l'acceptation des carburants de synthèse.

 

De plus, le Rassemblement National (RN) critique l'impréparation des gouvernements, aggravée par la situation géopolitique liée à la guerre en Ukraine, et soulève des inquiétudes concernant les risques suivants pour notre industrie :

 

  • Une dépendance aux matières premières exposant à des risques géopolitiques

  • Une fragilisation de l'industrie automobile européenne face à la concurrence internationale

  • Un risque accru de pénuries d'électricité

 

Face à ces préoccupations, il reste à voir si cette perspective sera partagée par la majorité. Compte tenu de ces enjeux, il est légitime de se demander si la politique européenne en matière de véhicules électriques pourrait être remise en question, affectant significativement le marché et les investissements futurs.

 

CHINE

En 2023, 6,1 millions de véhicules électriques ont été vendus en Chine, ce qui représente un quart des ventes mondiales de véhicules électriques. Grâce à ces chiffres, la Chine s'est affirmée comme le leader incontesté du marché mondial cette année-là. Entre 2009 et 2017, le gouvernement chinois a investi 53 milliards d'euros dans le développement des véhicules électriques, offrant des bonus à l'achat et attirant des soutiens internationaux par d'importants investissements dans ses nouvelles marques automobiles. Parmi ces marques, BYD s'est particulièrement distinguée, soutenue notamment par Berkshire Hathaway, la société d’investissement de Warren Buffett, qui a investi 230 millions de dollars en 2008. À la fin de 2023, BYD a surpassé Tesla en vendant 41 000 véhicules électriques de plus que le géant américain. De plus, la perspective d'une usine BYD au Mexique, qui réduirait les coûts d'exportation vers les États-Unis, le Canada et le Mexique, a suscité la méfiance de Donald Trump. L'ancien président américain a menacé d'imposer une taxe de 100 % sur les véhicules chinois fabriqués au Mexique s'il était réélu.

 

Stella Li, la vice-présidente de BYD, a exprimé sa réticence à se développer aux États-Unis, qualifiant le marché américain de trop compliqué pour les véhicules électriques. Malgré cela, la Chine continue de cibler le marché automobile mondial, voyant dans l'électrique une opportunité stratégique. Dès les années 2000, la Chine a pris de l'avance en investissant massivement dans ce secteur, notamment grâce à un accès privilégié à des matières premières critiques comme le lithium, le nickel, le cobalt et le graphite.

 

La compétitivité chinoise dans le secteur des véhicules électriques est aussi renforcée par des coûts de production réduits, partiellement attribuables à des pratiques de main-d'œuvre controversées, notamment le travail forcé des Ouïghours, une question soulevée par des organisations des droits de l'homme.

 

En outre, BYD a établi des usines non seulement en Chine et au Mexique, mais aussi en Thaïlande, Ouzbékistan, Brésil, Indonésie, et bientôt en Hongrie. Cela marque un tournant depuis 2019, quand la Chine est passée d'un déficit à un excédent commercial de 100 milliards de dollars annuels dans le secteur automobile.

 

Cependant, après une ascension rapide, BYD a récemment rencontré des difficultés, perdant la tête du marché mondial au profit de Tesla en avril 2024. À la mi-juin, Berkshire Hathaway a vendu 1,3 million d'actions BYD, marquant un moment potentiellement significatif.

 

Face à cette concurrence jugée déloyale, les États-Unis et l'Union Européenne ont augmenté leurs droits de douane sur les importations chinoises, touchant des secteurs stratégiques incluant les véhicules électriques. Les droits de douane américains pourraient passer de 25 à 100 %, tandis que les européens ont proposé des taxes allant de 27 à 48 % sur les véhicules électriques chinois, contre 10 % auparavant. Ces mesures pourraient entraîner une hausse des prix des voitures électriques chinoises de 17 à 38 %.

 

ETATS-UNIS

Selon les sondages, une réélection de Donald Trump aux États-Unis est envisageable. Connu pour son scepticisme envers les véhicules électriques, Trump a déclaré sur CNBC que ces véhicules ne vont pas assez loin, coûtent trop cher et sont tous fabriqués en Chine. De plus, une étude de BloombergNEF révèle une corrélation entre la proportion de véhicules électriques dans la flotte totale d'un État et les votes pour Joe Biden lors des présidentielles de 2020, avec la Californie en tête, où 25% des voitures neuves vendues au premier semestre 2023 étaient électriques.

 

Un risque majeur pour l'électrification aux États-Unis serait l'arrêt des aides financières de l'administration Biden, incluant 7,5 milliards de dollars pour la construction de réseaux de recharge et jusqu'à 7 500 dollars de subvention pour l'achat de véhicules électriques fabriqués localement. Biden avait initialement fixé un objectif de 60% de véhicules électriques pour 2030, mais l'Alliance pour l'Innovation Automobile, qui regroupe les principaux constructeurs américains, préconise de réduire cet objectif à 40 – 50%, en incluant les véhicules hybrides.

 

Malgré ces ajustements, Biden reste un défenseur du véhicule électrique, ayant affirmé en 2021 que l'avenir de l'industrie automobile est électrique.

 

Cependant, l'adoption du véhicule électrique aux États-Unis fait face à des défis structurels et sociologiques. La géographie étendue et les distances à parcourir sont bien plus grandes qu'en Europe, et les Américains, qui voient leurs véhicules comme un symbole de liberté, préfèrent les longs trajets, contrairement aux Européens qui utilisent plus fréquemment le train. De plus, la faible autonomie des véhicules électriques et les temps de recharge plus longs ne facilitent pas leur adoption. Un sondage d’Alix Partners fin avril 2024 montre que seulement 35% des Américains sont prêts à acheter un véhicule électrique, un chiffre stable depuis 2021. Une solution réside dans le développement de la batterie solide, promettant une autonomie de 1 000 à 2 000 km avec une recharge quasi instantanée.

 

LE MARCHE DU VE : EN ATTENTE D’UNE INNOVATION ?

 

Nous observons que, malgré son coût élevé, la principale réticence des consommateurs face au véhicule électrique concerne l'autonomie de la batterie, qui est actuellement d'environ 350 km. Cette autonomie est jugée insuffisante comparée à celle des véhicules thermiques, qui peuvent atteindre jusqu'à 1 000 km avec un plein d'essence. Selon un sondage Viavoice de juin 2023, 78% des Français hésitent à envisager des vacances à plus de 350 km de chez eux en voiture électrique, principalement en raison de cette limitation d'autonomie.

 

Face à ce défi, la recherche se concentre intensément sur l'amélioration des batteries. Les investissements dans le développement de la batterie solide sont colossaux, mobilisant à la fois des fonds privés et des ressources étatiques. Une batterie solide offre plusieurs avantages potentiels : une autonomie accrue, une moindre dépendance aux métaux rares, une durée de vie prolongée, un coût réduit et une meilleure sécurité grâce à sa moindre inflammabilité.

 

Concernant l'avancement technologique, le Japon semble en tête, avec Toyota et Nissan prévoyant de commercialiser leurs premières batteries solides respectivement en 2027 et 2028. Cette étape représentera une avancée majeure, bien que des améliorations continueront d'être nécessaires, notamment pour l'industrialisation de la production, qui présente des complexités supplémentaires.

 

D'autres constructeurs comme BYD, soutenus par le gouvernement chinois et en collaboration avec des universités locales et d'autres fabricants comme CATL, ont également annoncé le début de la production pour 2027. La compétition dans ce domaine est féroce, avec des perspectives de croissance significatives pour le marché des batteries à l’état solide, qui devrait atteindre 3,37 milliards de dollars en 2028 avec un taux de croissance annuel composé de 44,7%.

 

De grands acteurs de l'automobile, conscients de ces enjeux, investissent massivement. Hyundai a annoncé un plan d’investissement de 47 milliards d’euros, dont la moitié sera consacrée aux voitures électriques, aux logiciels et aux technologies liées aux batteries, incluant la batterie solide. Volkswagen, quant à elle, a investi 122 milliards d’euros dans l’électrification de ses véhicules.

 

Chez TOROW, la batterie solide est au cœur de nos ambitions. Nous avons récemment déposé un brevet en collaboration avec l'université Paris-Saclay concernant des matériaux électrolytiques pour batteries solides. Ce brevet marque un pas significatif vers le leadership de TOROW dans le développement de cette technologie, posant les bases pour de futures innovations qui pourraient révolutionner l'utilisation des véhicules électriques.

 

CONCLUSION

Le véhicule électrique, malgré un contexte politique de plus en plus conservateur, semble difficile à écarter, en partie grâce aux importants investissements réalisés par les principaux acteurs du marché. Même en Italie, sous le gouvernement de Giorgia Meloni, perçu comme étant à l'extrême droite, des subventions sont accordées aux véhicules propres, y compris les véhicules électriques. Le gouvernement fait également des avances à BYD, encourageant le fabricant chinois à produire ses voitures sur le sol italien.

 

Les recherches actuelles sur le véhicule électrique promettent de surmonter certains obstacles majeurs tels que l'autonomie limitée, le coût élevé et la dépendance aux métaux rares, grâce au développement de la batterie solide. Toutefois, il est probable que les avancées significatives dans ce domaine ne soient pas pleinement réalisées avant une dizaine d'années.

 

Il est également crucial de noter qu'après avoir parcouru environ 65 000 km en moyenne, un véhicule électrique commence à émettre moins de CO2 qu'un véhicule thermique. Ce point est essentiel à considérer dans le contexte actuel du réchauffement climatique, soulignant l'impact environnemental positif à long terme des véhicules électriques.

 

TOROW est là pour accompagner ce développement.


Fabien PREVOSTEAU,
Analyste TOROW

 

SOURCES

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